Le Parler Borain



Le Parler Borain
 
par André Capron


Extraits du texte d’une conférence du 18/01/06 au Cercle Archéologique de Mons par André Capron.
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Le parler borain est, qu’on le veuille ou non, moribond, même si depuis quelque temps il suscite, me semble-t-il, un regain d’intérêt. Il y a sans doute encore maintenant un nombre assez important de personnes qui ont une connaissance passive du borain mais on ne peut nier que le nombre de personnes qui peuvent parler ou écrire couramment ce dialecte s’amenuise de plus en plus, surtout parmi la bourgeoisie.
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L’instruction obligatoire (devenue effective en 1921) est  une des raisons pour lesquelles le borain s’est peu à peu francisé et a été considéré par certains comme une entrave à la promotion sociale.
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D’où vient le patois borain et où est-il parlé ?
Si nous disposons de nombreux textes nous permettant de suivre l’évolution du français, il n’en n’est pas de même pour les dialectes. Depuis le 9ème siècle les documents politiques (Serments de Strasbourg, le plus ancien témoignage à la fois de la langue française et de la langue allemande, 842), les chartes et, plus tard, les textes littéraires (ex. Séquence de Sainte Eulalie, fin du 9ème siècle, dans la région de St Amand les Eaux) sont écrits en langue vulgaire, qu’on appelle ‘ancien français’, avec bien sûr, des traits dialectaux selon les régions.  Dans  la  Séquence de Sainte Eulalie environ 6% du texte correspond, selon Madame Biedermann du CNRS, à ce qu’on pourrait appeler le « dosage dialectal du texte » ; on trouve, par exemple,  le mot picard diaule pour ‘diable’.
A Liège, il faut attendre le XVII e siècle et dans notre région le XIX e siècle pour trouver les premiers textes littéraires en dialecte.

En ce qui concerne le « borain central », les plus anciens textes littéraires  écrits en borain datent du dernier quart du XIX e siècle. Ce sont surtout les ouvrages de Henry Raveline, pseudonyme du Docteur Valentin Van Hassel, de Pâturages, né en 1852 et décédé en 1938). L’orthographe utilisée par Raveline nous permet de nous faire une idée plus ou moins correcte de l’aspect phonologique. Pas question, bien sûr, d’enregistrements sur bande en ce temps-là !

Le patois borain fait partie de la grande famille picarde, le picard appartenant lui-même au groupe des ‘langues d’oïl’. , c’est-à-dire l’ensemble des dialectes romans parlés  dans la moitié nord de la France et dans la partie francophone de notre pays :notamment le picard, le wallon, le champenois, le lorrain, le francien (dialecte de l’ Ile de France au Moyen-Âge et  l’origine du français), le normand, le bourguignon, le morvan etc.

La zone dialectale picarde est très étendue : c’est une zone de plus de 23.000 km2, soit plus des 2/3 de la Belgique. En France elle recouvre la presque totalité du département du Nord (exception faite d’une zone qui, au point de vue dialectal, prolonge la Flandre –Honschoote, Wormhout, Steenvoorde), le Pas-de-Calais (Boulogne, Arras), la Somme (Abbeville, Amiens), une partie de l’Oise (Beauvais) et une partie de l’Aisne (Saint Quentin), et en Belgique, la partie occidentale de notre province.
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En Hainaut, la frontière entre le picard et le wallon est une bande de plus ou moins 10 à 20 km de large qui va de Chimay à Braine-le-Comte en passant par Thuin et La Louvière.

 Où le borain est-il parlé ? Au Borinage, répondront la plupart des gens à qui vous pourriez poser la question. C’est à la fois vrai et faux. Je m’explique.
Il faut faire une distinction entre le Borinage géologique, socio-économique et socio-culturel d’une part, et d’autre part, le Borinage dialectal.
Le Borinage , en tant que région charbonnière au couchant de Mons, recouvre un territoire situé grosso modo au sud de la Haine, ou si vous préférez, au sud de ce qui fut le canal de Mons à Condé ou , actuellement l’autoroute Mons- Valenciennes, entre Cuesmes et Boussu, avec comme limite à l’ouest une ligne allant de Boussu à Dour, en passant par Elouges, au sud une ligne allant de Dour au sud de Frameries en longeant le Bois de Colfontaine, et à l’est une ligne allant de Frameries à Cuesmes. En tout une quinzaine de communes, si proches les unes des autres, que, bien souvent, on passe de l’une à l’autre presque sans transition.

Seulement 9 de ces 15 communes , à savoir : Cuesmes, Jemappes, Quaregnon, Wasmuel,.Hornu, Wasmes, Warquignies, Pâturages et Flénu, peuvent être considérées comme faisant partie du même groupe dialectal

Pourquoi ?
Parce que, au point de vue dialectal, Boussu, Dour et Elouges ont un parler qui a tendance à se rapprocher du Rouchi et que, d’autre part, le parler des habitants de Frameries et d’une grande partie de La Bouverie s’apparente à celui de la région du Centre. Ceci n’empêche que les habitants de Frameries, La Bouverie, et Eugies à l’ouest  et Elouges, Dour et Boussu au sud-est sont des Borains à part entière !

Deux exemples pour montrer ces différences : Quand un citoyen de Frameries dit : :
Quand i passoût d’léz l’ maison d’in boulaindgie tous les pans trianinent de peuie  (Bosquétia)
Un Borain de Pâturages dira :
 Quand i passót d’léz l’ maison d’ én boulindgé tous les pégns trianôt’ de p

Deuxième exemple
Un boussutois, comme Bernard Deramaix dans Au Fond du Puch’…,dira :  M’pa n’attindoit foqu’ cha, mais un borain de Pâturages ou de Quaregnon dira : M’pa n’attindót foqu’ ça / çoula.
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Pierre Ruelle, professeur à la section d philologie romane à l’ULB, écrit  dans un article intitulé Le Patois Borain et publié en 1992 dans la Revue de Sociologie de l’Institut de Sociologie Solvay :
        Le parler borain possède une unité remarquable dans les localités suivantes citées  d’ouest en est : Hornu, Warquignies, Wasmes, Quaregnon, Pâturages, Wasmuël, Jemappes, Flénu, Cuesmes.
Il ajoute :
       Si l’on n’examine que le parler, il faut admettre que Frameries et La Bouverie  s’apparentent plus à la région du Centre qu’au Borinage.         

Dans un autre article, publié en 1977 dans la revue La Pensée Wallonne, Pierre Ruelle dit ceci :
       Le Borinage occupe le versant sud de la vallée de la Haine, d’une ligne Boussu- Jemappes -Cuesmes au nord jusqu’à une ligne Dour-Eugies au sud. Le dialecte n’y est uniforme que dans les villages qui en constituent le centre : Wasmes, Quaregnon, Pâturages.

Cette région, où – comme le dit Pierre Ruelle – le borain possède une unité remarquable, compte actuellement plus ou moins 100.000 habitants. Mais le nombre de personnes capables de parler couramment le borain est de loin inférieur, bien que le nombre de personnes, surtout chez les plus âgées, qui ont une connaissance passive du parler borain soit relativement élevé.
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Quelques aspects du parler borain .

I. Mots ou expressions obsolètes ou rarement utilisés.

Comme toutes les langues, le borain a évolué et continue à évoluer. Des mots ou des expressions utilisés couramment à une époque, finissent par sortir de l’usage courant, ou sont remplacés par d’autres.
Mon premier exemple sera l’équivalent borain de ‘fermer la porte’. Chez Raveline, qui a commencé à écrire ses contes et ses pièces aux environs de 1875, on trouve clower pour ‘fermer’ et l’uche pour ‘la porte’. Voici deux extraits de ‘Pou dire à l’Eschriène’ où vous trouvez le verbe clówer : « il ét in s’lite, sans sawo clowé ses yiés » ou bien « In buvant d’l’ iau, d’arai mau m’panche, eyé de n’clov’rai gnié ein z’yié ». Voici un autre extrait de Raveline où vous trouvez le mot uch’ : « Comme Zandrine est rintrée in s’cabaret, elle a vu l’huche dou gardeign ouvrie ».
Chez Henri Tournelle, qui commence à écrire une quarantaine d’années plus tard que Raveline, on ne trouve plus clower’ dans le sens de ‘fermer’ mais ‘clore’.
Voici ce que dit le personnage du Mariage de Guerre (H.T.1918) lorsqu’il revient de son Voyàge dins les Flandes :  «Qué voyâge, mes infants! Qué scaudrie! Qué pitié! Soixante heûres su mes gambes éyé sans clore é zié ! » De nos jours, la plupart des Borains diront : frumer.
Quant à uch, Henri Tournelle et d’autres auteurs du 20ème s. emploient encore ce mot mais je crois que la plupart des borains diront maintenant : frume el porte, plutôt que frume l’uche.

Voici une dizaine d’ exemples de mots ou expressions qui sont devenus obsolètes, ou qui sont maintenant rarement utilisés. Je vous les cite dans des contextes qui en font ressortir le sens.

=  ablagne (fiancée, bonne amie) : Ed n’ai pu vu m’n’ablagne depis sis s’maines eyé vous trouvez qu’i n’a rié qui presse ! Vous n’ fréquentez nié comme vous stez là. C’est ce que dit un des personnages de Huit Borégnes dins ée Château (HT.). Maintenant on entendra plus fréquemment : coumére ; métresse.

=  s’ambrokier (s’endormir ; s’assoupir) : dans une vieille chanson boraine, recueillie par Albert Libiez (1877-1943), un amoureux dit à sa belle, comme Roméo au pied du balcon de Juliette :
‘Tout au matégne, je me suis levé… Ouvre ta porte, ma mie, à ton Djan qui revient…’ Et la belle répond : ‘Pourqué urbèyes-tu si timp’ Quand je sus ambrokiée ?’ càd. ‘Pourquoi
cries-tu / hurles-tu si tôt alors que je suis assoupie ?
Cet extrait me permet de vous donner un autre exemple de mot devenu plus ou moins obsolète : urbèyer, qui signifie ‘hurler, surtout en parlant du vent’. Voici un autre contexte : Tout l’nuit’ passée, el vint a urbèyé pa ddzous l’porte du guernier’ (PR).

=  s’asconsier (s’abriter, se mettre à l’abri) ‘Ed vèx qu’dins chaque famie on eusse ess
nécessaire : du feu pou s’rinscaufer, ée toit pou s’asconsier (HT.)

=  askèyî  (échoir, tomber) : ‘Tous les Nowés ét’ asquéyus, ét’ passés eyé Proute n’awot
djamins auyu l’azar d’assayé d’èl cougnole (HR.)

=  bèrziner (remuer, être très actif) : ‘Il awot ein ome t’aussi vayant qu’ein fier de fauque ; i n’sawot gnié d’morer tranquie ; i bersinot toudis ; i n’ét djamin à rié.’ (HR)

=  bougner (s’) : (se quereller) : ‘C’est l’vieye famiye Djean Lariguette qu’ vous dalez vî
s’bougné, s’ermette, s’ fé vî in lait, s’ fé vî in biau.’ (HR)

=  n’ pus saó pa yu darde avé ‘ne saki ( ne plus savoir que faire pour qqn, ne plus savoir comment s’y prendre avec qqn) ‘Ddépuis qu’i n’a pus rié à mète in s’pipe, de n’sé pu pa yu darde avé li, i n’ fait foc djumî.’ (PR)

=  ouvrer à lavóla (travailler sans avoir le cœur à l’ouvrage) : ‘Les deus fèmes ont poussé ein souspir. El’ sont inralées à l’cinse, eyé el’ ont ouvré à lavaulà, sans idée, s’atindant co
potièpe à d’ l’ imbrouye au nuite (HR)

=  mête (pétrin) ‘Elle ét d’lez s’maîtte, plan d’belle-fleur, elle versot d’ l’iau caute ; ell’
 mettot enn’ pougnie d’sé, ein pot d’gès… ell’ piestrichot…’ (HR)

=  daler su lès grosses  (rouspéter à haute voix, gronder) : ‘Au castiau on n’ volot gnié l’ leyé rintrer. Il a follu qu’i dalisse su les grosses, éyé qu’i fasse dou passe-temps.’ (HR)
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II.Sens borain différent du sens français.

Il est des mots, locutions ou expressions qui ne signifient pas la même chose, ou pas
exactement la même chose en borain qu’en français. Par exemple, si un borain dit
qu’il est bié d’bôché ne vous imaginez pas qu’il se livre à la débauche ; il veut simplement dire qu’il est triste, désolé, inconsolable. ‘I n’a nié d’avanche à s’ débauché, oublions pou n’ djournée les larmes eyé l’tristesse’ dit un personnage du Mariage de Guerre
Franc-Borégne dans sa pièce ‘Victor el Coulonneûx’ écrit : ‘Il a l’air debauché come eugne 
qu’a pierdu s’quéezaine.

Voici d’autres exemples :

=  cadâve peut signifier ‘cadavre’ comme en français ; mais il peut également signifier : ‘corps d’un homme corpulent ou d’un animal très gros’. ‘Dou bon sang, dou plaisî, c’est dou djônne salô dvins s’cadâfe. Dou bon sang ravigote (HR). ‘Il awot doulà en’ biette qui
souquiot, es’ queue pus longue qu’ en’ corde de gayole. Es’ cadâfe arôt fait deus côps
l’tour d’el plagne (HR)

=  carnassier ,en borain, n’implique pas nécessairement la notion de viande. Un borain peut être ‘carnassier à l’ soupe’, par ex. ; le mot signifie alors ‘friand de…’. Voici un extrait de ‘Lutteu par amour’ de H.Tournelle : ‘C’est n’curiosité de vie n’biette si carnassière au pichon’.La bête en question est, je crois un phoque ou une otarie.

=  fatâl (formidable, énorme, extraordinaire, fameux) :’T’as fait in fatâl niqué l’après-deinner! (HR) – ‘Si d’ fais co n’ pareye brète, l’après-deinner, d’arai n’ fatâle terre ! (HR)

=. ómicîde, -pe (responsable) : ‘C’est l’état desplorabe de vou trottoir qu’a sté cause homicibe de m’n’ accidint’ (HT)

=  r’bus / ërbus / rébus  1.(dicton, petite histoire morale et souvent humoristique) : ‘Le r’bus raconte qu’i vaut moué ette losse que Mayeur, que l’ plache dure pus lonmint.’ (HR)
2. (comptine) : ‘Des adolles. Des canoles.Des six cints. Des prochains. De la vie d’Espagnol!
Hic, Hoc, Des broques ? Alors, dehors! ’C’est vous qu’est goque’.Ed’ vous ai dit l’erbus qu’i follot pou djuer à goques!’ (HR)
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III. Richesse du parler borain.

….. Certains concepts peuvent parfois être exprimés par plusieurs mots ou locutions. Par ex. une ‘volée de coups, une raclée’ peut se traduire d’au moins huit façons :  dëguëzine ; docsinâde ; docsinée ; douye ; doublûre ; (ë)rplotûre ; ranse ; rapasse.
Voici d’abord un extrait qui, à lui seul, illustre  cinq de ces huit mots : ‘N’ deguezine ? C’est comme on pourrot dire enne rance, enne doublure, enne erploture, enne douille 
Voici pour ‘docsinâde’ : ‘Tou cach’ après ‘ne bonne docsinâte,  ène bone, pou qu’ tou t’ in souv’nisse el resse dé t’vie’ (HR)
Pour ‘docsinée’ : ‘On arot dit qu’i bachot ses ragnes pou rcewo es’ docsinée’ (HR)
Et enfin pour ‘rapasse’ : ‘Vicha douçi, tas d’ laits mauvias, que d’ te bayisse en’ rapace !’
(HR)

=  Voici un autre exemple de concept qui peut se rendre de plusieurs façons : ‘être affamé’ :
awó pus fégn que les rates (d’église) ; aó pus fégn kë lès tchés d’ Mon ; èsclèfer d’ fagn ;
iète mwèrt dë fagn ; aó l’ ranète ; vî tout bleû(se) ; aó pus fégn qu’ée strineû ;  aó dès
dints come dès brokes de viole
‘Les djins aôt’ pus fagn que les rates d’église, pus fagn que les tchés d’ Mon (PR)
‘Quand c’ que nous deinrons ? D’escleffe de fagne (HR)
‘D’ai toudi fégne, ed’ vois tout bleu. D’ai l’ ranette. D’ai pus fégne qu’é strineu.(HT)
‘ D’ai toudi fégne, mais fégne, d’ai dès dints comme des broques de viole (HT)

=  Voici enfin un troisième exemple destiné à vous montrer la richesse du parler borain : ‘un mauvais caractère’ peut être traduit en borain par caractère ërbrougné ; lèd cafômô ; maoumét ; móluwégn ; mourdreû ; tournëmô
‘Ee mouzon sec comme ée camp d’pelle, twois quarts du temps, c’est l’signe d’ée caractère erbrougné (HT)
Perluttes d’ inguéze, prautes de grand-mére…On va m’ loumer laid cafaumau (LD)
‘C’est c’ mahoumet-là, hée, ça n’ wouève minque toudis s’ visage que pou l’ fé aller au
r’vièrs’ (Augustin Dupont)
Quéqu’ fois à é flamind ed demandos l’ quemégne, mais nié moyé d’ comprinde des
pareils moluégnes’ (HT)
‘ I n’ faut nié jugé les dgeins d’ prime abord. Quand on ravise em n’ homme, on pinse
qu’il est mourdreux, mais on a tort. Il est doux comme é ptit mouton’ (HT)
‘Tu rclame toudis…tu c’ t’ ée tournemau’ (HT)

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IV. Le borain est souvent un parler très imagé :

=  ‘prendre un instant de repos’ peut se dire : ‘fe° toubak’.On peut imaginer des ouvriers ,
interrompant leur travail ‘pindant e° n’anvé’ pour fumer ‘ne bouchîe’, ou bien ‘ne torkète’.

=  Le mot nanvé ou anvé  (correspondant au montois avé), étant lui-même une image puisqu’ il signifiait à l’origine le  temps de réciter un Ave Maria. Ex. : ‘Quand elle es’ t’ arivée à les tois-quarts de l’esquièle, elle a fait n’ milète toubak (HR), ou bien : ‘Nous avonnes fait toubaque à ein cabaret pou mingé enn’ tartine de froumage avet n’ jatte de café, èyé pou lèyé rpouser l’ quevau (HR)

Voici d’autres façons imagées d’exprimer certains concepts :

=. Ël fossier a djà bu én’ péte d’sus s’ compte : il est moribond

=  Ome / fème d’ astó : homme / femme bien équilibré (< ‘asto’ : pièce de bois pour soutenir ou équilibrer). Ex.:‘I faut des hommes d’asto pou ette devin l’ police. I faut d’l’autorité. (HT)

=  I n’ d’ ara gné pou én saclot :cela ne va pas prendre beaucoup de temps, cela sera rapide. Il ne faut pas beaucoup de temps pour remplir un saclot càd un petit sachet. Ex. : I faut rpolie m’ quémîche… I n’ d’  ara nié pou ée saclot. S’il a deux tois quèrtiaux, ça n’ fait rié.(HT)

=  porter à bèc (se donner des baisers. Origine : expression de colombophile) ‘I mousse Fred eyé Yontine qui port’ té co toudis à bec…i spardté des sminchs de baises.’ (HR)

=  bouter fi / in filet ( mot à mot : introduire un fil, comme dans le chas d’une aiguille, de là : comprendre, déchiffrer, venir à bout d’une tâche difficile) : ‘Les fèmes ?… Sarôs-t’ bouter fi avet les fèmes ?…Quand n’c’est gnié des diyâpes, c’est des anjes.’ (HR) – ‘I n’a gnié ein tribunâl pou bouter fi à vou n’affaire (HR) – ‘ Faut avouer qu’ vous avez tout l’ minme ée caractère erbrougné. I n’a nié moyé d’ bouter filé avé vous.’ (HT) – ‘On n’ sarot gné bouter én filet là-dvins.’ (PR = c’est une situation inextricable)

=  candjer s’ chike dë costé .(changer d’avis) : A ‘De t’ définds d’ dire du mau de m’ n’amisse Axipé !…’ – B ‘Commint t’ n’ amisse Axipé ?… T’as cangjé t’ chique de costé ?… C’est ti-même qui l’ loumos des pus vilés noms…’ (AD)

=  gné aó d’ porte dë dié (ne pas cacher sa pensée, dire ce qu’on pense sans détours) ‘Elle pèt m’intinde ; ed n’ai nié d’ porte de d’ dié, mi ; ed dis çou que d’ pinse.’ (HR)

=  mète sès dints su l’ guèrnier (se passer de manger) : ‘ l’ boulindgé : ‘I n’ara nié d’ pégne audjerd’hui ;’- X ‘On pèt mette ses dints su l’ guernié, d’abord ?’ (HT)

=  fée én cu-l’vé (faire un petit déplacement, un petit voyage) : ‘Djamin d’ leu vie y n’awôtent quitté leu villâche, même gné fait é cu lvé pou d’allée à l’ ducasse de Blaugies.’ (AB)

=  c’èst dou fwêre in ‘ne basse 1. (PR : c’est du foin dans une flaque boueuse, càd. c’est une affaire embrouillée) ‘Intindons-nous !… Il a du fwer in l’ basse… El garçon du mayeur n’est-i nié d’allé trouver s’ pa ?’ (HT) – 2. (cela ne sert à rien) : ‘El Signeur awot biau dire que çoulà n’ét gnié permis… Boûte !… Dou fouère in n’ basse !… I n’ l’ ascoutôt’ gnié…’ (HR)

=  awó l’ intrée d’ ël mèzon (se dit d’un jeune homme qui est autorisé, par les parents, à visiter chez elle, la jeune fille dont il est amoureux) : la fille : ‘Quand d’allée vous décider à dmander l’intrée d’el maison ?’ – (l’amoureux) : ‘Ed’ vouros bié tout d’ suite, mais pour mi, vo pa m’ dira non. C’ n’  est pourtant gne l’ bon cœur qui m’manque…Ed vous vois si voltiers’ (HF)

=  c’ est l’ bac ki s’ ërtourne su l’ pourchó (c’est bien fait pour lui, il n’a que ce qu’il mérite, c’est le retour de la manivelle :’Depuis l’ertraite de Russie, el bac s’ertourne su l’ pourchauL’ mayeur rexisse va in fai n’ maladie tél’ mint qu’il a peu pou s’ piau’ (HT.EG)

=  ça n’ èst gné kèyu su l’ artwale d’ é bosteû (ce n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd) (HT.EG)

=  pus tème kë la salète (la statue de ND de la Salette représente une femme maigrichonne) :
Il a deux roulottes traînées pa deux gvaux pu tèmes que la salette’ (HT.FM)

=  il èst sódâr (il est fichu, son affaire est cuite ; < le tirage au sort) : ‘Si dje l’ twève devant mes ziés, il est saudart ; ed li coupe ess gozette comme à ée canard pou l’ casserole.’ (HT.HR)

V. Pas mal d’expressions imagées ont leur origine dans les métiers ou les jeux :


Du métier de charretier :

=  carier cron / dwat : (mener une vie dissolue / mener une vie honnête) : ‘El cieu qui carîe  cron est souvint au fossé (EL.EPB) / ‘D’ai toudi sté ée n’ honête homme, dins m’ vie, d’ai toudi carrié doit’ (HT.Rit)

=  carier malvô (dire ou faire qqch de malvenu, faire une bourde) : ‘Ed leu dit à z’air de dvise : « El marié st’ée pau ramoli… » I n’d’a nié eugne qui respond… Dje m’ dis : « D’ai carié malvau. Comme ça va la, c’est des parints au marié’ (HT.PP)

=  fée s’ câr à n’ sadju (prendre la direction de…) : ‘Boniface, à l’ plache de fé  s’ car ayeux, ervenot tous les djoûs au cabaret Caloûe.’ (HR.ES)

carióter zigzag / daler in cariotant (marcher de travers, en zigzagant comme un homme
saoûl) : ‘Les hommes retournaient inhuftés… i ralôtt’ in cariotant zigzag…’ (RC.AL)

=  sakier l’ lamiô (travailler dur ; ‘lamiô’ = palonnier, çàd. La barre transversale aux extrémités de laquelle on fixe les traits des chevaux) : ‘I a dit que d’ devros continuer à saquié l’ lamiau, si de n’ volos gnié daler caché m’ pagne’ (HR.DL)

minjé l’avène au cul dou car : laisser tout le travail aux autres. (l’exemple vient de EL.EPB)

Du métier de charbonnier :

Diverses expressions avec le mot « trèt »  1) extraction, évacuation des produits du front d’abattage vers la surface 2) ensemble du personnel occupé au fond de a mine à l’évacuation des produits abattus :

lèyér l’ trèt in plan (in blanc): abandonner l’activité, le travail auquel on est occupé.. Ex. ‘I suffirot qu’i seus’ trop scrang pou li leyez el trait in blanc (FB.VC).

Ël trêt monte : (on commence à se bagarrer ; la zizanie commence). Ex. : ‘Dins l’ménage el trait monte souvint pou l’question du ravitailmint ;à tâpe on pèse chacun s’ morchau’
(HT.MG)

Fée  monter l’ trêt : (provoquer une querelle ; semer la zizanie). Ex. :’Les musiciégnes font 
monter l’ trait… i dit’ té qu’ils leu faut enn’ aurmintation, ou bié qu’i s’ mett’nt in grève’
(AD.TP)

L’ trêt a fêt : (c’est terminé). Ex. : ‘Tu n’ sès gné que l’ trait a fait avec Frouchure… elle n’in vèt pus d’ Frouchure… elle se marie avé é n’aute’ (AD.TP)

Expressions avec le mot « coulisses » coulisses, sont des rails de voie Decauville, comme on en trouvait au fond du charbonnage pour y faire rouler les wagonnets

Ërmète à coulisses : (. L’expression signifie donc : remettre sur les rails). Ex. ‘C’és’ t’ enn fèmme qui l’a fait déroyé… sara enn’ fèmme potieppe, qui l’ermètra à coulisses (AD.TP)

Calé come èl dèrnier djeû d’ coulisses d’ à front : (se dit de qqn qui est bien outillé, bien
équipé, ou bien habillé. Origine de l’expression : le dernier élément de voie Decauville, à front de taille, était toujours le mieux ‘calé’ comme il était le plus récent). Ex. : ‘Elle est calée comme el dernier d’ jeu d’ coulisses d’coulisses d’à front : des bagues, des pindants, é collier à grosses bourlottes… (FB.VC)

E° g’vau d’ coulisses : (c’était le cheval qui tirait les wagonnets, tirait donc des charges très lourdes quand les wagonnets étaient pleins. D’où le sens de ‘personne qui peut travailler dur’).Ex. : A ‘Savez bié que d’ai oïu l’ mau du diâpe pou l’impêché d’ d’aller à l’ cuisine peler petotes ou bié rlaver les bidons avec les fèmmes à djournées’ – B ‘C’est st’ ouvrer qui li faut.C’ té gvau d’coulisses.’ (AD.TP)

Rmète ël taye dwate : (‘taye’ partie d’un chantier où l’on abat le charbon, partie que l’on doit parfois redresser pour la facilité du travail, d’où le sens de l’expression ‘redresser une
situation, un état de choses qui laisse à désirer ’). Ex. ‘Dj’aros autant attinde douci qu’ell
taille fusse ermise doite… Gustavine est télemint mau tournée’. (HT.HR)

Dzèrter pus fèl k’e° brulé du grizoû : (explication inutile) : Ex. : ‘Si l' bedo arot auyu 'n pénchie d’ bon sin, i n' arot pus rié dit et il arot dzèrté pus fel qu' én brûlé d' grisoù. Au yeû 
d' ça, il a rcouminché’ (PRCB)

mète dès aróyó : (mettre des empêchements, entraver, freiner < ‘aróyó’, tige de fer ou de
bois que le sclôneur introduisait entre les rayons d’une roue de wagonnet pour freiner
celui-ci) : ‘Elle a oyu rade ertracé tous les impêchemints, tous les aroyos rincontré pa les deux amoureux depuis sept ans.’ (HT.CP)

rwer / lèyer ‘ne saki ó candjwô (abandonner qqn à son sort, le laisser pour compte ; un
candjwô’, était une niche dans la paroi d’une galerie pour y garer un wagonnet vide, ou permettre aux ouvriers de se garer, de se ‘mète à canje’) : A : ‘D’ comptos m’imbarquié dmégne’ – B :’Tout seu ?’ – A ‘Bié seur ! Ed layos Crésoline au candjwot’ (HT.TT)

dmorer ó candjwô (être laissé pour compte, rester sur une voie de garage) :’Dins çouçi, c’est co mi qu’est bastard… On donne du galon à tout l’ monde eyé mi d’ demeure au candjwot’
(HT.FM)

rmète / rinde ës’ livrét à ‘ne saki (congédier, révoquer qqn. Origine : quand un ouvrier de charbonnage était congédié, on lui rendait son « livret », càd. le document qui indiquait les  périodes de travail dans un ou plusieurs charbonnages. Ce « livret accompagnait l’ouvrier et servait notamment lors de la mise à la pension) ‘I n’a nié à s’ comprinte avé li. Au souper, il a félicité Coralie, eyé à douze heures par nuite, i m’a donné orde de li r’mette ess’ livret’
(HT.HB)

Du tir à l’arc, un des sports favoris des borains :

Il a óyu ‘ne flèche su s’ tiète : pour qqn qui est abasourdi
I tire à deux pièrces : (mène deux activités de front, presque toujours avec une connotation péjorative) : ‘Il a laumint qu’ d’ai vue qu’ Germaine tirot à deux pierces’ (AD.TP) (càd. laisse espérer le mariage à deux soupirants à la fois)

C’ès’t’e° pris à e° côp / e° pris à daler à l’ prumière chafe : (se trouve dans une situation précaire, instable. Explication : ‘prix’ à peine vissé sur le vèrguèyon de la herse, lors du crossage au paillet, ou au tir à l’arc). Peut se dire par exemple d’une personne dont la santé est très précaire ou bien d’un objet très fragile qu’on a déposé à un endroit d’où il pourrait très facilement tomber

C’ès’t’ e° ramasseû flèches : (au tir à l’arc, le ramasseû flèches était l’homme qui ramassait les flêches des tireurs et à qui l’on payait à boire ou qui vidait les fonds de verre, de là le sens de l’expression : profiteur) Ex ; A ‘Si vous n’ d’ avez nié profité, vous avez oyu tort’  B ‘Dje n’ sue nié ée ramasseû flêches, mi, ni ée cafouilleû. (HT.SS)


Du jeu de crossage en plaine, un autre jeu très populaire au Borinage
Lèyer l’ chólète in l’ âe (laisser tomber, ne pas insister, par exemple lors d’un différend.)

Explication : lorsque une cholète se perdait dans une haie épaisse, les joueurs avaient parfois beaucoup de difficulté pour la retrouver et parfois, en désespoir de cause, abandonnaient leurs recherches, d’où le sens de l’expression). Ex. : ‘Nous stons là sus l’ pouégne de bâtîe des biaux châteaux in Espagne, mais d’ai idée qu’i vaut mieux laiché l’ cholette in l’âe’ (AD.TP) (Rem. Attenelle/Dupont disent ‘laiché’ et non ‘lèyé’, encore un exemple de la « francisation » du borain.)

E° côp d’ cholète pour indiquer une courte distance. Ex. : ‘I dmorot à ée côp d’ cholette de nous maison’ (PR.DR)

Tourner / daler (tout’) à fût d’ croche (tourner à rien, dépérir) : ‘Faut vî come i ramaîrit.

I s’in va tout à fût d’ croche’

 Du jeu de balle pelote :

Prinde é pas d’ jeû : (reculer pour prendre son élan et, par extension, pour s’écarter ou se sauver). Ex. : Dans Ermariage de geuerre, un employé de l’administration communale vient annoncer à César, que son nom figure sur une liste de la Werbestelle et il lui dit : ‘Si dj’ai ée conseil à vous donner, c’est d’ prinde ée pas d’ jeu. Pour mi, on va ramasser les hommes sans long courrie. (HT.EG)

Taper dins l’gant d’ëne saki  (dire ou faire qqch qui devance les vues, les projets de qqn) ‘Quand Adonis a souné à messe qu’on arot des avantages à dmorer inchane, dje n’ l’ ai nié rwé trop long… I tapot dins m’gant.’ (HT.EG)

Du jeu de cartes :

ète mirló ( être le perdant, la victime. Origine : le jeu de mirló.Celui qui perdait la partie était mirló’) Ex. A :’Nou mariage… nous rparl’rons d’ ça pus tard… A r’voir, Cadie’ – Cadie : ’Ed vous préeviés qu’ si s’in présinte ée n’aute, vous srez mirlau’ (HT.EG)

 D’autres expressions imagées font allusion à des animaux

èl cat èst dins l’órlóje (il y a de la discorde dans le ménage) : ‘I dit à s’ fème : « pouqué n’avée nié fait du bouillon ?… » I n’ d’a nié follu d’ pu, el cat ée dins l’orloge.’ (HT.TS)

lèyer ‘ne saké daler à keûe d’ rate (laisser qqch tourner en eau de boudin, finir par un échec, finir en ruine). Ex. : ‘ça fait qu’ tu laichros d’aller à queue d’ rate, enn maison que tou t’a baïé tant d’ peine à monter. (AD.TP)

Rlumer / rbouler des ziés d’ marcote /  come ène marcote in couches la marcote, c’est la belette, et l’expression signifie : regarder avec des yeux perçants, pleins de colère. Ex. :‘Djean wuiche in rboulant des yés d’ marcote eyé in sclaquiant l’huche (HR.DL) – ‘ Inl’ ravaitiant avet des yiés d’ marcote, des yiés pus michants qu’ des espleinques’ (HR.VCI) 

– ‘Les sorcières de Warquegnie éet’ à twâs. El’ pus vyèye ée toute rakerpie avé ‘nn espale pus haute que l’aute, èle erlumot des zyés come ène marcote in couches èy’ avé s’ nez èyé s’ minton, on arot pouvu fée én croque-chuke (PR.CB)

daler s’ mète à pièrce (aller se coucher). Ex. Dj’ai tél’mint somme que d’dormiros su n’ esquielle comme les glennes. Seul’mint d’ n’ onze nié m’mette à pierce. (HT.HB)
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VI.Un point que l’on pourrait peut-être souligner est celui-ci : le borain transforme parfois la prononciation de certains mots français :

Par aphérèse, (chute d’un phonème au début d’un mot)
Ex.: ‘arène’ au lieu de « narine » : ‘Ses arènes pichôt’ come des noques ; i toussot come ein r’nâ poussi’ (HRCM)
‘chalote’ au lieu de « échalote » ‘Ses chalotes sont plus plantiveûses que les miennes’
(HT.Msa)

Par prosthèse (ou prothèse) (adjonction, à l’initiale d’un mot, d’un élément non étymologique, sans modification sémantique
‘dèscandale’ au lieu de « scandale » : Dmorez, Manouel ; 
n’ all’ z’ in nié fai du ‘descandale su l’quemégne.) (HT.PO).

Ou en interchangeant les consonnes liquides et r.
Ex.:  ‘carculer’ au lieu de « calculer ». ‘ En’ carculez gnié tant !… Dit’ oui ou bié non !
(HR.VCI)
 ‘carvère’ au lieu de « calvaire » ‘D’m’ in voë au Carvaire de Fram’ries.’ (HR.VCI)    
 ‘Bèrjique’ au lieu de « Belgique » ‘I n’ volot gnié ète ercouneu, quand il arivrot in
Berjique.’ (HR.CM)
   
 ou le contraire :
 ‘colidor’ au lieu de « corridor » ‘Il arrivté à l’uche dou colidor dou Paradis.’ (HR.VCI)     

Ou encore par altération du mot :

=   ‘filimète’ au lieu de   « millimètre ». ‘On mzure les parts au filimète eyé ça finit toudi
pas des disputes.’ (HT.MG)

=  ‘cancagne’ au lieu de « cocagne » ‘A l’ Fontaine-à-Ramons courot l’ Fontaine
Cancagne.’ (LD.MVB)   
   
=  ‘Tchantcha’ au lieu de « Tantale » ‘C’est morie d’ soi su l’huche d’ée cabaret, çouçi ;
c’est l’ supplice de Tchantcha.’ (HT.HB)     
   
=  ‘fil-à-m’zûre kê’ : au fur et à mesure que…  ‘Enne lueur rouge, de pu in pu clére, va
 apparaite fil-à-m’sure que l’nuite quait’ (HT.)

=  ‘liméró’ au lieu de « numéro » ‘Oui, oui, on counouot t’ liméro !…Il est bié temps d’
fé l’ dégousté après côp’ (HR.EC)
=  ‘liméroter’ au lieu de « numéroter » ‘ Si djamin s’ gayard-là viét dins l’ pays borégne,
qu’i faisse liméroter ardumint ses ochaux…’ (HT.MG)        

=  ‘magrite’ au lieu de « marguerite » ‘Ed vous vîrai voltiers quand vous m’arez apporté
ell’ prumière magrite qui florira el’ djoû d’ell’ guinguette.’ (HR.ES)                  
   
=  ‘matante’ au lieu de « tante » ‘Nous dalons souper à l’ mon d’em’ matante’ (HRES)
(Rem. ma+ta+ante)         

 =  ‘Mathieu Salé’ au lieu de « Mathusalem » ‘Ils ont vi vieyes come Mathieu Salé’
(HR.CM) (Rem. exemple d’étymologie populaire)         

VII.Sur le plan grammatical je voudrais mettre en relief quelques caractéristiques du borain : l’emploi du subjonctif imparfait et l’emploi des pronoms.

a) Le subjonctif imparfait est resté d’usage courant en borain, alors qu’il est moribond en français,.. i folot que d'cantisse, i folot que d'finichisse, que. d’rindisse, que d’ dalisse.On le trouve même là où l’on attendrait un subjonctif présent : « i faut que d’ dalisse »

Pour les verbes avoir et être, il y a deux formes de subjonctif imparfait :
 Awisse/avisse (défectif) et eûsse
 Seûsse (défectif) et fusse
Ex :
   De n’ vourós gné qu’t’awisse ouvré pou nérié. (H.R.)
   Faut-i qu’ vous d’eûsse gangné des yârds pou rouler in automobile. (HT)
   Em’ fème vourot que d’ seusse rwa (HR)
   Qu’est-ce que ça pouvot fée qu’i fusté nwârs, bleûs ou n’émporté qué (PR)

b) Le tutoiement. en bor., ne se pratique qu’entre égaux habitués à vivre ensemble (enfants. frères et soeurs, compagnons de travail). Il est rare entre époux. D’enfants à parents, il constitue un manquement grave. De parents à enfants et de supérieurs à inférieurs,  il est un témoignage de vif mécontentement. En borain, « tutoyer » se dit  atuire,.
Ex :il atuit s’ pé come én djône de tché.

c) la 2e pers sg. s’emploie parfois pour s’adresser à plusieurs personnes.
Ex. Tou vas morî… T’es deûs losses… T’as volu tromper l’ diâbe

d) parfois absence du pronom  pers sujet dans les interrogations :
ex : Savéz bié que s’n ome a sté cwaché à fosse ?
       Sèt’ bié qu’ tou vas awô n’ chaffe si tou n’ tês gné ?.
       Comint dalones widjer dë d’ci?
       Qui stēz?

e) absence de préposition entre possédé et possesseur lorsque celui-ci est un prénom, un patronyme ou un sobriquet.
Ex : lès solées Motée
        Ël barake Crassé Fèsse
        L’ome Bèrtine



2 commentaires:

  1. Vous pouvez trouver d'autres informations sur le site d'André Capron ainsi que certains de ses ouvrages en téléchargement gratuit.

    www.andrecapron.net

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  2. tres bonne publication qui me confirme comme je le pense que le borain est tres riche en vocabulaire et en expressions malgres ce que beaucoup pense c est riche language qui se perdmais pas tout a fait puisque nous stons la....

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