mardi 8 mai 2012

Alternative Libertaire 


par Cerise 

Je me suis permis d'emprunter le titre de cet article à Louis Savary et à Jean-Claude Derudder qui avaient déjà réalisé un cours métrage sur l'aspect social de la vie dans la région du Borinage, dans les années 1970. Ce film a été étouffé dans l'oeuf, avec la complicité des Maisons de la Culture, sans doute pour ne pas déplaire aux autorités responsables. 

Misère au Borinage 

Nous voici en 1998. Patric Jean, originaire de Quaregnon, a été marqué par Misère au Borinage, le film tourné dans la région, par Henri Storck, en 1933. Ce film retrace la vie des ouvriers mineurs qui, à l'époque, représentaient la majorité de la population, et décrit avec beaucoup de réalisme leurs pénibles conditions d'existence. De retour dans son Borinage natal, Patric Jean constate que peu de choses ont changé Il décide d'écrire une Lettre à Henri Storck, Les Enfants du Borinage. Mr Storck a tout juste le temps d'en prendre connaissance, il décède quelques semaines plus tard. 

C'est dans la salle du Plaza de Mons que le film a été présenté au public régional pour la première fois, le 24 septembre 1999. La caméra pénètre à l'intérieur d'un taudis dans lequel vivent une mère et ses quatre enfants... les spectateurs ne peuvent retenir un murmure d'effroi. Cela se passe près de chez nous. Nous découvrons des êtres humains, assistés pécuniairement par les CPAS, mais abandonnés par les structures qui devraient leur permettre d'apprendre à lire, et à gérer leur vie quotidienne, ils vivent, isolés de tout contact avec les autres citoyens. 

Malgré cent ans de gestion "socialiste", les exclus du régime, qui ne sont plus les travailleurs du fonds de la mine, mais les minimexés, les sans emploi, sont toujours là. Cette misère se transmet de génération en génération. Les enfants sont directement dirigés vers des écoles d'enseignement dit spécial, dont les professeurs, nullement motivés, se contentent d'assurer un minimum de gardiennage. Les assistants sociaux restent assis derrière leurs bureaux, au lieu de se trouver sur le terrain. Un adulte d'une trentaine d'années, passé par cet "enseignement" spécial, conscient de l'impasse vers laquelle il a été conduit apparaît à l'écran. Il nous explique que faute d'instruction élémentaire, il ne sait ni lire, ni écrire... 
  


Patric Jean nous interroge sur la cause de l'existence de ces exclus, à l'aube du vingt et unième siècle. Les politiciens au pouvoir dans la région sont-ils incapables de réagir aux problèmes posés. 

C'est avec beaucoup de talent que Patric Jean nous explique qu'il ne s'agit pas d'une incapacité, ni d'une démission, mais d'une volonté. En conservant un sous-prolétariat qui n'a pas bénéficié de l'instruction à laquelle il a droit en tant que citoyen, les barons rouges disposent d'un électorat taillable et corvéable à leur merci. Quelques lettres de soi-disant interventions pour l'obtention d'une maison, ou d'un emploi, courrier, qui, de plus, bénéficie de la franchise postale payée par la collectivité, assurent un contingent de voix non négligeable. D'accord pour le suffrage universel, pourvu qu'il soit manipulé. Les dimanches d'élection, les camarades candidats organisent des ramassages d'électeurs. 

Après avoir brossé un portrait de tous ces gens abandonnés dans leur quart monde, Patric Jean interroge deux Bourgmestres directement concernés. André Col, premier citoyen de Quaregnon est tellement fier de rappeler les cents ans de gestion socialiste qu'il trône devant la Charte de Quaregnon, en annonçant qu'il n'y a plus de pauvres dans le Borinage, mais bien des assistés. Le public est à peine remis de cette intervention que l'on pourrait, à la rigueur, qualifier de candide, qu'il reçoit en pleine gueule, celle cynique du Mayeur de Colfontaine, Yvon Biefnot : J'ai beaucoup voyagé, et j'ai vu des bidonvilles, des taudis, au Caire, à Casablanca ou ailleurs. Mais là les gens sourient. Les enfants jouent avec des ballons. Les filles se tressent les cheveux. Et ici, on tire la gueule !!! Cette intervention déclenche la réprobation bruyante de toute la salle. À tel point que l'orateur suivant, qui n'est autre que Maurice Lafosse, dont tous attendaient avec impatience l'intervention, voit ses propos couverts par le chahut de la salle. Il paraît que l'on n'aurait rien perdu, Maurice ayant été moins bon que de coutume. Solidarité et hiérarchie socialiste oblige, on a beau être Bourgmestre de la Ville de Mons, il convient de laisser la vedette au Président du Parlement wallon. 

Interrogé après le film quant aux réactions éventuelles des politiciens mis en vedette, Patric Jean tient clairement le discours suivant : Ils ont été invités à la première, il savent ce qu'ils sont dans le film, mais ils ne sont pas venus. Je pense que les extraits choisis sont représentatifs de ce qu'ils m'ont dit. S'ils pensent que j'ai trahi leur pensée, je les invite à m'attaquer en Justice. On regardera ensemble les rushes, on y trouve encore des choses plus intéressantes. Le problème n'est pas financier, c'est un question de choix de société. Une minorité s'enrichit au-delà de toute mesure pendant qu'une majorité croissante rencontre la misère. On nous a éduqués dans un système idéologique qui nous fait croire que nous avons le choix entre un communisme de style URSS, ou un capitalisme total. Or, c'est faux, on peut développer un autre type de société. 


Encore, faut-il le vouloir... 
"Lutte Ouvrière" Citoyen Révolution Wasmes Hainaut Pauvreté

Cerise

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